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En ce treizième jour de voyage, je quitte la Moldavie pour retourner en Roumanie. Le passage à la frontière est cette fois beaucoup plus long que lors de mon entrée en Moldavie : je passe plusieurs heures en plein soleil, à attendre. Un conseil à mes amis motards : emmenez un parapluie ou une ombrelle. Ce n’est pas pour la pluie, mais pour vous protéger du soleil pendant ces interminables files d’attente. Heureusement, l’entrée en Roumanie se fait sans accroc, et même avec le sourire. Un employé roumain me lance une remarque qui me fera la journée :
« It’s the first time I’ve seen a Black man on an old motorcycle. Can I take a picture of you? »
« C’est la première fois que je vois un homme noir sur une vielle moto. Je peux te prendre en photo ? »
Je lui ai répondu de se faire plaisir avec un grand sourire et un V de la main.


Iași, la ville universitaire
Ma première étape est Iași, l’une des plus grandes villes de l’Est roumain. C’est un centre universitaire majeur, avec plus de 60 000 étudiants, dont près de la moitié à l’Université Alexandre Ioan Cuza. Mais au-delà de son ambiance étudiante, Iași est aussi une ville au patrimoine culturel et religieux extrêmement riche.
Je visite le Palais de la Culture, un chef-d’œuvre néo-gothique rénové récemment, qui domine le centre-ville. Je passe aussi par la Catedrala Mitropolitană, l’une des nombreuses églises orthodoxes de la ville. Côté ambiance, Iași offre un savoureux mélange entre traditions locales et modernité.
C’est une ville où le passé rencontre le présent, où chaque rue semble offrir une nouvelle expérience. Si vous aimez les lieux à la fois vivants, historiques et accessibles, Iași est une étape incontournable.


























La (re)traversée des Carpates puis halte à Brașov
Je continue ma route vers l’ouest. Je retraverse les Carpates, mais cette fois par des routes bien plus montagneuses que celles empruntées à l’aller. Sur certaines portions, je suis contraint de rester en première à 5 km/h : je n’arrive pas à accélérer suffisamment pour passer la seconde.


Malgré ces difficultés, la beauté du paysage me fait tout oublier. Forêts denses, cimes brumeuses, villages perchés… c’est un décor de conte de fées. Sur le bord de la route, je croise de nombreuses familles Roms vendant des champignons, des baies et des plantes cueillies en forêt. Une scène touchante, reflet d’un autre rythme de vie.



Je fais halte à Brașov, souvent décrite comme la plus belle ville de Roumanie. Je plante ma tente au camping Honigberg, un lieu pour le moins insolite : il est situé dans la cour d’une ancienne maison paroissiale évangélique, juste en face de l’église fortifiée d’Hărman. L’ambiance est calme, hors du temps. Sur le camping, je fais la rencontre d’un autre motard, Antonius. Il est venu donner des cours d’arts martiaux. Le lendemain, il m’invite chez lui.
Antonius, l’Australien de Transylvanie
Chez lui, autour d’un café, nous échangeons longuement. Antonius est un Australien qui a vécu et travaillé dans plus de 70 pays. Pour lui, la Roumanie est l’un des meilleurs endroits au monde pour vivre. Il est tombé amoureux de la Transylvanie, de ses montagnes, châteaux et traditions. Il connaît bien les side-cars soviétiques : il a possédé trois Ural dans sa vie. Il me confie une anecdote qui me fait rire :
« Les garnitures de frein sur les Ural ne s’usent jamais. Elles sont si dures qu’en appuyant de toutes tes forces… la moto continue d’avancer. C’est ce que j’appelle : des freins pour la vie. »
Le midi, je monte à l’arrière de sa moto pour aller dîner au centre-ville de Brașov.



Une ville entre nature et histoire
Je profite du reste de l’après-midi pour visiter la ville. Brașov est entourée de montagnes, un cadre rêvé pour les amateurs de randonnées. Mais la ville elle-même vaut le détour : la vieille ville médiévale, avec ses ruelles pavées, maisons colorées et l’impressionnante Église Noire, est tout simplement superbe.
Au-delà de son passé, Brașov est aussi une ville vivante et étudiante, avec l’Université de Transylvanie qui accueille chaque année des milliers d’étudiants, roumains comme étrangers.














Une halte à Bratislava
Après une seconde nuit au camping, je réalise que cela fait déjà 16 jours que je sillonne l’Europe avec mon side-car. Il est temps de rentrer : les obligations professionnelles m’attendent. Je prends donc la direction de la France, en roulant plus longtemps, avec moins d’arrêts. Enfin… c’était le plan.
En arrivant à Bratislava, capitale de la Slovaquie, je tombe par hasard sur un concert d’Imagine Dragons. Je n’ai pas de billet, mais je profite du spectacle de loin, bercé par la musique et l’ambiance électrique de la foule.
Le lendemain, je suis épuisé. Je décide de prolonger mon séjour à Bratislava d’une journée. Je passe l’après-midi à flâner sans but, porté par l’envie de découvrir, tout simplement. Entre façades pastel, statues et ruelles pavées, je me laisse surprendre par la poésie discrète de la ville
















Sur le chemin du retour
Puis vient le moment du grand retour vers Lille. Et là, c’est la galère : je perds mon kick. Comme j’ai eu la brillante idée de retirer le décompresseur de mon moteur, il m’est impossible de démarrer à la poussette tout seul.
Résultat : trois jours de retour, avec des étapes d’environ 400 kilomètres, à demander régulièrement de l’aide pour démarrer la moto. Comme un clin d’œil du destin, je retrouve la pluie qui m’avait déjà accueilli à l’aller.
Une fois le side-car rangé et mes fesses posées sur le canapé, l’aventure me manque déjà. Malgré les galères, malgré les nuits sans sommeil, malgré les pannes, je n’ai qu’une envie : repartir. Parce que ces routes, ces visages, ces imprévus… c’est ça, la vraie liberté.



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